L'un des plus célèbres tireurs d'élite canadiens de la Première Guerre mondiale fut un Métis qui portait le nom de Henry Louis Norwest. Norwest naquit à Fort Saskatchewan, en Alberta. Il était d'ascendance française et crie. Le caporal suppléant servit pendant près de trois années au sein du 50e Bataillon d'infanterie canadien et établit un record : il tira 115 coups mortels.33 Norwest, qui avait été garçon de ferme et avait participé à des rodéos, se mérita également la Médaille militaire avec agrafe, ce qui en fit l'un des quelque 830 membres du CEC à avoir mérité ce double honneur.
La carrière militaire de Norwest ne connut pas un début si glorieux. Il s'enrôla en janvier 1915 sous le nom d'Henry Louie, et il fut libéré trois mois plus tard en raison de mauvaise conduite. Il attendit huit mois, puis s'enrôla sous un nouveau nom avec un dossier vierge.
Norwest s'avéra être une source d'inspiration pour son unité. Voici ce que l'un de ses camarades écrivit à son sujet :
Notre célèbre tireur d'élite connaissait mieux que la plupart d'entre nous le prix de la vie et celui de la mort. Henry Norwest accomplit sa terrible tâche superbement parce qu'il croyait que ses aptitudes spéciales ne lui donnaient d'autre choix que de remplir cette mission indispensable. Notre tireur d'élite du 50e se consacra passionnément à sa tâche et fit preuve d'un détachement complet lorsqu'il se trouvait au front. ... Et lorsque nous avions la rare occasion de le croiser, nous le trouvions d'un abord agréable et gentil. Il était l'un des nôtres et il nous servait toujours d'inspiration.
Le tir en poste isolé était un rôle d'infanterie très dangereux. La plupart des tireurs travaillaient en paire, un observateur, qui scrutait les environs et signalait tout mouvement de l'ennemi, et un tireur. On a dit que Norwest possédait toutes les qualités nécessaires pour le tir en poste isolé : excellent tireur, il pouvait rester immobile pendant de très longues périodes et possédait des techniques de camouflage extraordinaires. Il passa une grande partie de son service dans le No Man's Land, cet épouvantable espace séparant les forces opposées. En outre, Norwest et son observateur se glissaient souvent derrière les lignes ennemies.
Ce tireur exceptionnel du Bataillon gagna la MM en 1917 sur un promontoire de la crête de Vimy appelé « le Bourgeon ». Le Corps canadien, qui faisait partie de l'offensive massive des Alliés, devait s'emparer de la crête. Les Alliés avaient déjà tenté en vain de s'en emparer. L'attaque soigneusement planifiée des Canadiens, elle, réussit. La plus grande partie de la crête tomba aux mains des Canadiens dès la première journée, le 9 avril. Trois jours plus tard, les deux postes ennemis qui restaient, y compris « le Bourgeon », furent conquis.
Dans la citation accompagnant la décoration qui fut accordée à Norwest, on précisait qu'il avait fait preuve d'une « grande bravoure, d'habileté et d'initiative dans sa tâche de tireur d'élite après la prise du « Bourgeon ». Il réussit ainsi à sauver la vie de nombre de nos hommes. »
L'année suivante, une agrafe fut ajoutée à la MM de Norwest, mais dans la citation, on n'indique pas la raison. En août 1918, il fit de nouveau preuve d'un courage indéfectible. Au cours de la bataille d'Amiens, en France, les forces alliées firent une avance de 19 kilomètres en trois jours. Norwest détruisit de nombreux postes de mitrailleurs ennemis et établit le record de son bataillon comme tireur d'élite.
Une semaine plus tard, le 50e prenait ses positions en vue de sa prochaine tâche et ce fut la dernière mission du tireur d'élite. Le 18 août, soit trois mois avant la fin de la guerre, Norwest et deux autres soldats cherchaient un nid de dangereux tireurs d'élite ennemis. Le franc-tireur métis fut atteint par la balle d'un tireur isolé et fut tué instantanément. Pour les membres de son bataillon, un véritable héros venait de disparaître.
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